Seul dans Berlin – Hans Fallada

Synopsis:

Mai 1940, Berlin fête la campagne de France. La ferveur nazie est au plus haut. Derrière la façade triomphale du Reich se cache un monde de misère et de terreur. Seul dans Berlin raconte le quotidien d’un immeuble modeste de la rue Jablonski, à Berlin. Persécuteurs et persécutés y cohabitent. C’est Mme Rosenthal, juive, dénoncée et pillée par ses voisins. C’est Baldur Persicke, jeune recrue des SS qui terrorise sa famille. Ce sont les Quangel, désespérés d’avoir perdu leur fils au front, qui inondent la ville de tracts contre Hitler et déjouent la Gestapo avant de connaître une terrifiante descente aux enfers.
Aucun roman n’a jamais décrit d’aussi près les conditions réelles de survie des citoyens allemands, juifs ou non, sous le IIIe Reich, avec un tel réalisme et une telle sincérité.

Mon avis:

A l’occasion de la sortie du film cet hiver et parce que ma copine Avalon me l’avait chaudement recommandé, j’ai décidé de sortir Seul dans Berlin de ma PAL et de l’inclure dans mon programme de lecture.

J’avais vu une bande-annonce de l’adaptation: je pensais donc que l’histoire se concentrait sur un homme qui dépose dans Berlin des lettres dénonçant la réalité du nazisme et de ses conséquences auprès de ses pairs pour les inciter à se réveiller. En réalité, l’histoire du livre se concentre sur plein de personnages autour de l’auteur de ces lettres. Certains sont attachants, d’autres non mais tous ont un dénominateur commun.

Ainsi, s’il fallait que je résume ce roman, ce serait en parlant des pans de vie des habitants d’un immeuble. Bientôt, ces pans de vie s’élargissent aux personnes côtoyant cet immeuble. Plus qu’une dénonciation du nazisme, c’est un témoignage sur ce qu’était la vie pour les civils de Berlin. Hans Fallada réussit parfaitement à retranscrire l’atmosphère d’oppression et de peur qui régnait sur le pays. Il parvient à nous faire comprendre comment tout un peuple a été tenu en laisse pendant si longtemps. Avec nos yeux de contemporain, on a tendance à complètement occulter le fait que la menace de la mort planait sur tous, vraiment tous. Qu’elle n’épargnait personne, pas même les « Aryens » purs. Le danger rôdait déjà autour d’eux pour peu qu’ils ne pensent pas comme le moule le voulait.

Tour à tour, nous rencontrons ainsi les Quangel. Ce petit couple de quinquagénaires a perdu son fils unique. Mûs par le chagrin et la colère, ils se sont détournés du parti et ont décidé de semer ces fameuses missives dans la ville. Au départ, c’est un geste de colère puis progressivement, en se documentant pour dénoncer le quotidien du pays, ils ouvrent vraiment les yeux sur les contradictions du parti dont ils se sont détournés. J’ai apprécié ce petit couple tranquille qui se bat à sa manière avec un si petit geste mais qui peut être si lourd de conséquences pour eux. Leur force tranquille émeut et on a envie que leurs actions aient un impact tangible.

Mais au moins, je suis resté convenable, dit-il. Je ne me suis pas compromis.
L’avocat regarde longuement l’homme silencieux devant lui. Puis il dit: « Tout compte fait, je crois que mon confrère qui a défendu votre femme avait raison: vous êtes fous tous les deux.
– Est-ce que vous appelez cela être fou que de vouloir rester convenable à n’importe quel prix?
– Vous auriez pu le rester aussi bien sans vos cartes postales.
– Cela aurait été une approbation muette.

Ensuite, on a un couard fainéant qui parie aux chevaux et profite éhontément des femmes pour se faire entretenir. Celui-là m’a beaucoup fait lever les yeux au ciel, diantre et en même temps, devant la chance insolente dont il profite, on rit. C’est tellement injuste qu’on rit de le voir échapper à tous les bourbiers. C’est presque hystérique de rire ainsi mais en même temps, on finit par adorer le détester, ce pauvre anti-héros.

L’intrigue ne recèle pas d’explosions ou de grandes actions. Elle est semblable en fait à un long fleuve en apparence tranquille mais qui bout lorsqu’on s’en approche de près.

J’ai dévoré les 760 pages de ce roman sans jamais m’ennuyer. J’ai adoré suivre les personnages en me demandant comment tout cela se finirait.

La fin est douce-amère. Triste puis elle nous fait sourire. A l’image de l’Homme: elle oscille, elle nous montre le meilleur et le pire de l’Homme. Je pense que c’est ce que Hans Fallada a voulu faire passer. Il nous montre que malgré toutes les atrocités dont l’Homme est capable, il peut aussi trouver une rédemption. J’aurais aimé ce livre du début à la fin. Je suis vraiment contente d’avoir découvert ce roman et je pense que je le relirai encore. C’est une très bonne découverte qui restera inoubliable

4 commentaires sur « Seul dans Berlin – Hans Fallada »

  1. Je viens de lire et chroniquer ce roman et je l’ai adoré ! Les actes des Quangel sont louables, mais désespérés. Il me semble que nous ne devrions pas en arriver là, que l’action politique, la résistance, doivent se mettre en place bien avant de perdre les droits les plus fondamentaux, comme la liberté de parole et de mouvement. A ce stade du nazisme dans le roman, où tout est déjà verrouillé, la spirale de la violence semble déjà inéluctable. Cela m’évoque beaucoup notre époque, nous devrions toujours rester vigilant·es avant qu’il ne soit trop tard !

    1. Ca me fait penser à la grenouille qu’on fait cuire à petit feu. Elle reste dans l’eau parce qu’elle s’habitue progressivement et une fois qu’il est trop tard, il est trop tard pour elle. Le problème, c’est que le totalitarisme ne s’installe pas en un jour. Il s’insinue progressivement jusqu’à ce qu’il soit « normal » pour tous. Rares sont ceux qui ont les yeux ouverts et qui se rendent compte de la réalité avant qu’il ne soit trop tard.

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