Romance – Arnaud Cathrine

Synopsis:

C’est le mojito. C’est un léger accident. C’est parce qu’il n’a pas rencontré de fille. C’est parce que je n’ai pas rencontré de garçon. C’était juste pour essayer. C’est pour avoir tout fait ensemble. C’est pour tous les amis pareil. C’est entre lui et moi. C’est la première et la dernière fois. C’est rien. Ça va passer.

Mon avis:

Une fois n’est pas coutume, le roman nous est raconté du point de vue exclusif du héros. Vincente, lycéen connu pour ses tendances bagarreur mais pas méchant, est ouvertement gay. Sa mère et lui partagent une complicité qui nous fait sourire. Il a un meilleur ami, Octave, qu’il doit partager avec un autre gars, Lilian avec qui il ne s’entend pas des masses et une amie, Rokia, qui fait souvent tampon entre eux tous.

Avec Romance, je découvre la plume d’Arnaud Cathrine. J’ai été dépaysée parce qu’il écrit vraiment de la même manière dont s’expriment les garçons: le langage est familier, djeuns mais sans être lourd ou vulgaire. J’ai souri devant la vanne clairement tirée de Friends qu’on retrouve plusieurs fois dans le roman, j’ai trouvé qu’elle allait bien avec le contenu à venir de celui-ci.

Vincente veut tomber amoureux. Il idéalise l’idée même d’être amoureux, rêvant et fantasmant des rencontres qu’il a peur de faire. Il a un béguin pour un acteur porno, s’est inscrit furtivement sur des sites de dating pour se désinscrire avant de faire le premier pas dans la réalité… En fait, c’est un romantique timide qui s’est trouvé mais qui n’a pas encore trouvé comment le vivre.

Alors, par dépit, il se laisse convaincre par Rokia de donner sa chance à Pablo, un autre gay du lycée. Il se force complètement, il n’y a aucune ambiguïté de sa part mais il essaye parce que quelque part, il aimerait bien sortir de ses rêves.

Sa vie change du tout au tout quand il part en vacances à Fuerteventura.

L’auteur est très doué pour parler du premier amour. Avec la fluidité de sa plume et une poésie qui met en exergue une passion qu’on reconnaît, il nous fait littéralement vivre les bouleversements du premier amour. On ressent une beauté dans ses phrases, une vulnérabilité et une invincibilité qui nous rappellent ce qu’on a vécu à son âge. Là où d’habitude, on se rappelle de ce que c’était, Arnaud Cathrine réussit le pari de nous immerger dans cet émoi. On est noyé, emporté par cet éclat de passion. Il y a une espèce de fièvre qui s’en dégage et qui fait qu’on tourne les pages, complètement happé.

Pour autant, on voit clair dans ce que Vince ne veut pas admettre. Il est amoureux mais son élu n’est pas prêt. Vince est beaucoup plus avancé dans la relation. Alors il est voué à souffrir. On le sait. Mais quand on lit les envolées lyriques du récit, on met volontiers de côté cela. On attend de voir ce qu’il va se passer.

La seconde partie du roman est tout aussi bouleversante. Encore une fois, j’ai été conquise par la pudeur et le lyrisme des mots d’ Arnaud Cathrine. Par le biais de ces mots, je me suis rappelée la violence et le désespoir que peut engendrer le premier amour. Quand tout va bien, tout roule dans le meilleur de mondes. On a l’impression que ça durera éternellement et que rien ne sera aussi savoureux, que rien ne pourra surpasser ce qu’on ressent alors. Mais le corollaire est vrai: quand notre coeur est brisé, on a l’impression de mourir. Qu’on peut littéralement sentir notre coeur se fissurer et que rien ne le réparera.

Avec le recul, c’est là qu’on voit que ce roman initiatique s’applique à tous: il ne traite pas le premier amour avec la condescendance des adultes. Il s’adresse au lecteur comme un psy lui dirait « je t’écoute. Je ne te juge pas ». Finalement, le récit de Vince peut s’appliquer à tout le monde. Vince est peut-être gay mais ce qu’il vit n’est pas propre à son orientation sexuelle. Tout le monde a déjà vécu ce qu’il nous narre ici. C’est le récit d »un apprentissage qui se fait en continu. On a l’impression d’en sorti grandi, à l’instar de Vince.

Romance nous laisse donc ému et se conclut sur une note d’espoir, une ouverture. Le mot est peut-être écrit à la fin de cette histoire mais Vince a toute la vie devant lui et on ressent clairement l’espoir de cette nouvelle page pour lui. C’est un bien joli roman que celui-ci.