La septième vague – Daniel Glattauer

Synopsis:

Leo Leike était à Boston en exil, le voici qui revient. Il y fuyait la romance épistolaire qui l’unissait en esprit avec Emmi. Elle reposait sur trois principes : pas de rencontres, pas de chair, pas d’avenir. Faut-il mettre un terme à une histoire d’amour où l’on ne connaît pas le visage de l’autre ? Où l’on rêve de tous les possibles ? Où l’on brûle pour un(e) inconnu(e) ? Où les caresses sont interdites ? « Pourquoi veux-tu me rencontrer ? » demande Léo, inquiet. « Parce que je veux que tu en finisses avec l’idée que je veux en finir » répond Emmi, séductrice. Alors, dans ce roman virtuose qui joue avec les codes de l’amour courtois et les pièges de la communication moderne, la farandole continue, le charme agit. Léo et Emmi finiront de s’esquiver pour mieux… s’aimer !

Mon avis:

Vous l’aviez pressenti que la suite serait aussi vite engloutie que son prédécesseur, n’est-ce pas?

Nous retrouvons Leo et Emmi près de dix mois après la fin de Quand souffle le vent du nord. Dix mois pendant lesquels les emails d’Emmi se heurtent invariablement aux réponses laconiques et automatisées du manager du système. Ce manager du système, c’est une touche d’humour au milieu du drame dans lequel nous baignons depuis la fin du premier volume. C’est la provate joke récurrente qui nous fait sourire lorsqu’Emmi y fait allusion à quelques moments. C’est l’élément qui transforme le drame en dramédie.

Donc, comme je disais, dix mois se sont écoulés pendant lesquels Leo et Emmi n’ont eu aucun contact. Aucun de chez aucun. Niet, nada, nothing.

Et puis, parce qu’il faut bien revenir un jour, Leo revient. La conversation reprend. Oui mais…

Leo a désormais une nouvelle petite amie, Pamela tandis qu’Emmi a toujours Berhnart.

Mais ces dialogues…

Leurs dialogues…

Leurs échanges…

Ils vous happent toujours autant.

Trois fois, quatre fois, ils se font leurs adieux. Trois fois, quatre fois, ils ne réussissent pas à véritablement arrêter. A chaque fois ils le pensent mais à chaque fois, quelque chose les empêche d’éliminer l’autre de leur vie.

Enfin, nous apprenons à quelle Emmi physiquement parlant notre Emmi ressemble, même si cela était accessoire.

Et puis tout doucement, l’auteur nous emmène au dénouement.

Le point culminant de cette correspondance qui ne peut finir que de deux manières possibles. Parce qu’en fait, même si des échanges épistolaires peuvent être forts et intenses, ils ne peuvent pas durer éternellement. Tôt ou tard, l’un des deux veut forcément plus que cela. C’est la condition sine qua non de toute relation.

L’auteur nous le fait comprendre et accepter cette réalité qu’est le fait que le virtuel, même s’il représente un échappatoire beau et idéalisé de la vie quotidienne, ne la supplantera jamais. C’est une bulle d’air qui finit toujours, toujours par éclater et lorsque cela arrive, une question subsiste à laquelle il faut répondre: pourquoi cette bulle d’air a-t-elle pu se mettre en place? Quels problèmes l’ont causée? Et à partir du moment où vous avez les réponses à ces interrogations: que faire pour améliorer votre vie?

En ce qui concerne Emma et Leo, j’ai grandement apprécié la manière dont Daniel Glattauer les fait se retrouver. La manière dont il nous fait accepter une fin a priori impossible car comportant trop de contraintes mais qui est amenée de manière subtile et naturelle.

Emma et Leo auront mis deux ans mais jamais vous ne trouvez de longueurs au récit.

En l’espace de quelques centaines de pages, vous avez donc passé deux ans à suivre leur correspondance emailistolaire mais c’est comme si vous connaissiez ces personnages depuis toujours.

Vous ne les avez jamais vus.

Tout ce que vous savez d’eux, c’est par l’intermédiaire de leurs mots, de leur façon de s’exprimer, de se révéler dans leurs tournures de phrases et pourtant, ils vous paraissent plus intimes que n’importe quel autre personnage.

Et pourquoi?

Parce que l’écriture, c’est le meilleur moyen, comme toute expression d’art, de vous plonger dans la sphère la plus intime d’une personne.

Il ne suffit pas de jouer du piano, c’est aussi une affaire d’interprétation, de manière de faire ressentir la mélodie, de faire ressentir, de faire comprendre. Ca vaut également pour la peinture, pour l’écriture… pour vraiment tous les arts.

Là où les Liaisons dangereuses de Laclos se contentaient de nous narrer une histoire, le dyptique de Glattauer nous fait réfléchir sur les relations et les enjeux de la communication via les technologies modernes.

A l’heure où les liens se nouent et se délitent aussi vite qu’un email est envoyé, il nous montre également les aspects positifs de ces nouveaux échanges interpersonnels.

Ce dyptique peut en conclusion se lire sous plusieurs aspects, le divertissement et la réflexion mais de toutes les manières, il ne peut pas laisser insensible et en ça, je félicite l’auteur pour avoir su écrire un tel roman-essai qui émeut, fait rêver, rend mélancolique, touche en somme tout en apportant de tels éléments de pensée.

Retrouvez mon avis sur Quand souffle le vent du nord sur ce lien.

21 commentaires sur « La septième vague – Daniel Glattauer »

  1. J’aime vraiment ta manière de parler de ce diptyque et de cette suite. La correspondance virtuelle voilà quelque chose qui me parle vraiment et à plusieurs niveaux! Je sais trop bien jusqu’où elle peut conduire (ou ne pas conduire!) et ça me rend vraiment curieuse de savoir comment c’est exploité dans un roman!

    1. Je suis comme toi, la correspondance virtuelle est un sujet qui me touche particulièrement car c’est comme ça que j’ai rencontré mes amies les plus proches mais également ma moitié. Du coup, ce dyptique est vraiment une lecture dont le sujet m’interpellait dès le départ et qui fait réfléchir dessus sans s’appesantir non plus sur les pour ou les contre. C’est un roman qu’on peut lire sur plusieurs niveaux de lecture et c’est ce que j’ai aimé avec cet auteur

      1. Peut-être parce que le dialogue virtuel permet d’aller au plus près de l’autre derrière son écran, d’aller plus rapidement à la connaissance « vraie » de l’autre (à condition que ce ne soit pas une personne tordue). En tout cas, à ceux qui disent qu’il est impossible de nouer des relations sincères via le virtuel, je dis qu’ils se trompent parce que mon expérience m’a prouvé (comme à toi) le contraire.
        Mais il faut malgré tout faire attention. Le virtuel a aussi ce travers de parfois nous emmener bien au-delà de nos (la?) limite 🙂
        En tout cas, j’ai maintenant hâte de me plonger dans cette lecture! 🙂

        1. Justement, ce dyptique a le mérite d’exposer les arguments pour et contre les relations qui se nouent à travers le virtuel. Je dirais même que l’auteur expose les deux facettes du virtuel en général. Il ne se concentre pas juste sur les rencontres amoureuses mais également sur l’impact du virtuel sur le quotidien et sur les relations avec l’entourage concret des personnes concernées. C’est pour ça que ces livres peuvent autant être lus et (re)découverts à n’importe quel âge. On peut leur donner l’interprétation qu’on veut

          1. Je vois 🙂 Je ne suis pas trop fana de ce genre non plus mais certaines lectures ont été d’agréables surprises.
            Je pense par exemple à ce dyptique. Sinon, il y a Dracula qui est un vrai classique malgré quelques longueurs et les Liaisons Dangereuses qui trouvent grâce à mes yeux. Tu les as lu?

          2. Oui, Les Liaisons dangereuses sont un classique, et j’ai adoré les lire ! Mais je parlais surtout en littérature contemporaine ^^

          3. En contemporain je dois dire que je lis surtout du fantastique et des dystopies. Difficile de trouver des romans épistolaires dans ces genres ^^

      1. Oui je l’ai lu ! C’est vraiment différent, car on a affaire à un roman de manipulation, c’est vraiment particulier, mais j’ai toujours autant aimer la plume de l’auteur 🙂

          1. En tout cas j’ai hâte de savoir ce que tu en penses si tu le lis 🙂

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