My dark Vanessa (Ma sombre Vanessa) – Kate Elizabett Russell

Synopsis:

2000. Dans un prestigieux pensionnat de la Nouvelle-Angleterre, Vanessa Wye, élève brillante de quinze ans, tombe sous le charme de Jacob Strane, son professeur de littérature de quarante-deux ans. Débute alors une relation qui va durer des années.
2017. Strane est accusé d’abus sexuel par l’une de ses anciennes élèves. Vanessa, contactée par cette dernière, replonge dans ses souvenirs de jeunesse. Peu à peu émergent des doutes qui ne l’avaient jamais traversée. Mais peut-elle remettre en question son premier amour, cette relation fondatrice qui a infléchi le cours de sa vie? Est-il possible qu’elle se soit à ce point trompée sur cet homme qui lui déclarait son amour éternel?

Mon avis:

L’histoire nous est racontée par Vanessa.

Aujourd’hui, à trente-deux ans, elle apprend que son ancien amour, Jacob est accusé d’abus sexuels par plusieurs de ses anciennes élèves et elle se souvient. Quand elle avait quinze ans, elle est tombée éperdument amoureuse de lui et ils ont vécu une superbe histoire d’amour. Enfin est-ce vraiment la réalité?

Alors qu’elle nous emmène dans ses souvenirs et que l’action alterne entre présent et passé, on réalise que celui-ci l’a profondément marquée. De temps en temps, sans qu’elle n’en aie conscience, des pensées font irruption dans ce qu’elle observe dans son quotidien et montrent qu’au fond d’elle, elle sait. Elle sait ce qu’elle a vécu même si elle se refuse à l’admettre. Car si elle le faisait, des sentiments qu’elle ne veut pas affronter viendraient au premier plan.

Ma dark Vanessa est le récit d’une prise de conscience progressive, qui se fait contre le gré de l’héroïne. Elle refuse de toutes ses forces d’admettre la réalité quand cela la concerne, alors que lorsqu’elle voit les mêmes actions se produire pour d’autres jeunes filles, elle sait ce que cela signifie. Dans un monde où le mouvement #MeToo renverse les dés et redonne le pouvoir aux femmes, Vanessa s’est fait embobiner et violer et même si une partie de son cerveau le sait, la honte la fait se taire.

Ce récit, c’est celui de la libération de la pensée avant tout. Car avant de parler et de dénoncer, il faut déjà admettre soi-même la vérité et ça, c’est une énorme étape souvent, à mon sens, trop peu représentée. On lit toujours ce qu’il se passe après: quand les paroles s’affrontent et que la victime doit non seulement affronter la charge de la preuve mais aussi l’opinion publique qui la juge hâtivement. Mais jamais on ne lit à propos du cheminement qui mène la victime à ces étapes. Pourtant, ce cheminement est déjà un combat; c’est le combat contre soi-même.

En lisant ce roman, on comprend comment des monstres comme Jacob Strane peuvent sévir. Il leur suffit d’une faille, d’une vulnérabilité pour qu’ils s’engouffrent dedans avec des belles paroles et des manoeuvres de manipulation.

Devant certaines scènes, parce que j’avais du recul, je pouvais voir ces manoeuvres et j’aurais voulu que Vanessa les discerne également. Dans ces scènes, elle m’a frustrée. Comment rester de marbre quand on voit quelqu’un s’enfoncer toujours plus bas? Quand on la voit subir?

Vraiment, j’ai dû couper ma lecture de nombreuses fois tant le récit est dérangeant, dur pour les nerfs. Il nous montre que ce qui arrive à Vanessa est réel, pourrait arriver à n’importe qui autour de nous. Il nous montre comme il est facile de tomber dans le piège quand la personne en face de nous sait manipuler les faits et convaincre. Vanessa nous apprend qu’on peut aisément passer de victime à complice. Elle est la démonstration que le silence, c’est laisser faire. Que l’inaction, c’est également laisser faire. En arrivant à la fin du récit, j’ avais le sentiment d’être vidée comme si j’avais fait une course. Même si je n’adhérais pas toujours au comportement de Vanessa, je la comprenais. J’étais éprouvée. Mise à l’épreuve.

La conclusion de ce récit nous montre que le traumatisme passe par plusieurs étapes. L’admettre est déjà un énorme pas. La suite est faite de plusieurs énormes étapes et rien ne se fait facilement. C’est un combat contre soi-même et contre la case dans laquelle la société veut nous faire entrer pour ne pas être dérangée. Tout doit être manichéen. Elle ne souffre pas des nuances. C’est usant pour celui qui veut proclamer sa vérité.

Au final, cette histoire est je pense à faire lire par la jeunesse. C’est le témoignage effarant de ce qui peut se passer quand on sait vous retourner le cerveau.

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